Les super-héros sur les écrans

Taxi Driver

Taxi Driver est un film culte réalisé par Martin Scorcese et écrit par Paul Schrader , qui sort aux Etats-Unis en 1976. A l'affiche de ce film on retrouve Robert De Niro, Cybil Sheperd et la toute jeune Jodie Foster. Le film raconte l'histoire d'un tout nouveau chauffeur de taxi qui erre dans les rues de New-York, personnage ambigu qui à la suite d'une déception amoureuse trouve un nouveau but dans sa vie , qui sera de se débarrasser de ceux qui selon lui ne sont que des criminels décadents et de la racaille. Plus tard dans le film après un nouvel échec lorsqu'il tente de tuer un sénateur, il se met en tête de sauver une jeune prostituée des griffes de son mac.

Taxi Driver est un film ambigu et controversé, et la présence de ce film dans cette rubrique l'est encore plus. Le personnage interprété par Robert De Niro , Travis Bickle n'est pas un super-héros à proprement parlé, pourtant on peut retrouver dans son personnage des attraits que partage certains justiciers. Car il sera ici plus question de la figure du justicier ou du vigilante dans ce film que celle du super-héros soyons bien d'accord. On penche ici plus du coté du Punisher que de Spiderman

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Le film nous raconte l'histoire d'un homme solitaire qui décide se dresser contre la décadence et la criminalité de sa ville. Et c'est là le point le plus important de mon analyse. En effet, Travis Bickle ne  lance  pas sa croisade contre le crime  en réponse à la perte d'un proche tué par un criminel et qui justifierait par la vengeance un tel comportement ( on serait ici dans le genre du revenge movie , très prisé à l'époque ) . Cette croisade contre le crime ne se justifie pas non plus par rapport à son statut, Travis Bickle est un simple chauffeur de taxi , pas un inspecteur de police comme l'est Clint Eastwood dans L'inspecteur Harry ou bien Charles Bronson dans la toute aussi polémique saga du Justicier dans la ville . Certes il y a l'existence d'un trauma fondateur qui explique la  psychologie du personnage, mais celui-ci est lié à la guerre et pas aux criminels. Non, Travis Bickle décide de son propre chef que sa ville est malade et que c'est à lui de régler le problème, comme il se définit lui même comme un homme qui se dresse contre la criminalité lorsqu'il travaille face à son miroir ses phrases d'accroche, tel un super-héros qui travaille ses entrées. Même chose pour la fameuse séquence du '' you talking to me'' , tentative ridicule d'intimidation de ses futures victimes.

 

Travis est aussi très lié à la ville de New-York , à force de déambuler dans les rues de cette ville, il ne fait plus qu'un avec elle. A l'instar de Daredevil ou de Batman il se sens responsable d'elle et c'est bien elle qu'il veut sauver dans le film, sauver de la décadence qu'il  voit à tous les coins de rues et qui le plonge dans la paranoïa.  D'ailleurs c'est un des seuls chauffeurs de taxi qui ne rechigne pas à passer dans tous les quartiers de la ville même les plus mal-famés. De même il se déplace avec un taxi jaune, symbole iconique de la ville de New-York. Il travaille aussi toujours de nuit , comme un justicier nocturne. 

 

Travis décide au milieu du film de prendre les choses en main , et la première chose qu'il fait c'est de s'équiper. Il achète des armes , et confectionne des mécanismes pour les dissimuler sur son corps. Il s'entraîne ensuite de façon régulière, au tir en premier lieu, mais il inflige aussi à son corps un régime drastique que n'aurait pas renié Bruce Wayne. Sa première intervention en tant que justicier se fait lors du braquage d'un supérette , lieu commun de beaucoup de films de super-héros où les super-héros passent ou non à l'action et révèle ( ou non ) leur héroïsme. Le réaction de Travis Bickle lors de ce braquage est évidemment problématique mais nous y reviendrons plus tard. Mais ceci n'était qu'un imprévu dans le plan de Travis qui veut assassiner le sénateur Palantine, vexé de son échec amoureux avec un assistante de campagne de ce dernier. Et lorsqu'il passe à l'action il revêt son costume de justicier en se rasant la tête ce qui le rend méconnaissable aux yeux de la sécurité. Ce changement physique est intéressant car il montre que Travis devient autre lorsqu'il passe à l'action, il n'est plus Travis Bickle ,c'est son alter-ego qui prend sa place. 

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Ce changement physique renforce l'aspect parfois schizophrénique du personnage. Dans une lettre adressée à ces parents , Travis se présente comme un agent du gouvernement, plus tard il affirmera à Iris la jeune prostituée incarnée par Jodie Foster qu'il travaille pour le gouvernement dans les services secrets et que son job de taxi ne serait qu'une couverture à mi-temps. D'ailleurs lorsque cette dernière pense qu'il est un agent des stups, Travis est presque flatté par le fait qu'on puisse penser qu'il travaille pour le gouvernement. On perçoit assez nettement  chez Travis une fascination pour les métiers de l'ordre et militaire, en témoigne ce dialogue entre Travis et agent qui surveille le meeting du sénateur, où Travis même si il feint son enthousiasme pour les services secrets pour obtenir des renseignements, adorerait disposer d'un tel pouvoir. Dans ces moments où il se désigne comme un agent du gouvernement , on se demande si il n'en est pas quelque part convaincu et c'est très révélateur de la vision qu'il a de lui même et de sa mission, Travis pense faire le bien , il se voit comme un bon samaritain , un justicier au grand coeur. 

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C'est la fin du film qui donne sens au parcours de Travis Bickle, après avoir tué les hommes qui retenaient Iris, Travis est considéré comme un héros par la presse et par son entourage. Seulement le spectateur sait que Travis n'a rien d'un héros, personnage raciste et haineux, il ne devient un '' héros' que par accident , par un second choix. Le premier l'aurait amené à tuer un parfait innocent en pleine rue, rien de très héroïque. Son inaptitude à avoir une vie sociale normale l'isole et c'est pourquoi il se lance dans une telle entreprise, pour combler un manque que la guerre du Vietnam a crée et que Travis n'arrive pas à exprimer et à dépasser. Bien entendu il ne s'agît ici que d'un angle d'analyse sur un film qui en contient beaucoup d'autres, mais encore aujourd'hui Taxi Driver reste, en plus d'être un chef d'oeuvre, une vision saisissante et passionnante de la figure du justicier au cinéma. 



07/03/2016
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